L'impact de l’IA sur l’emploi

L’IA, notamment l’IA générative, va beaucoup influencer la productivité des individus et le marché de l’emploi. Des études récentes ont été menées pour comprendre ces changements afin de mieux anticiper les impacts à venir. Ces dernières années ont permis de collecter suffisamment de données pour commencer à répondre aux questions.

L’effet de l’IA sur le marché de l’emploi

La destruction d’emplois par les nouvelles technologies n’est pas automatique. Parmi toutes les dernières technologies qui vont bouleverser le maché de l’emploi, l’IA est l’une des seules qui semble tendre vers un impact positif.

Une étude américaine de 2013[i], largement diffusée, affirmait qu’environ 47 % des emplois étaient menacés par un remplacement dans les 10 années suivantes. Or, en 2023, il faut constater que ce remplacement de masse n’a pas eu lieu. La Commission de l’IA souligne que cette étude avait fait plusieurs erreurs, notamment la confusion entre exposition à l’automatisation et remplacement complet.

Un métier « exposé » à une nouvelle technologie comme l’IA est un métier dont une partie de l’activité peut être améliorée ou automatisée par cette technologie. Si une partie du travail seulement est automatisée, les autres tâches dépendent encore largement de l’action des humains. Ainsi, les nouvelles technologies permettent d’améliorer la productivité, la qualité de vie au travail et de se concentrer sur des tâches à plus forte valeur ajoutée.

Il reste que certains métiers seront effectivement remplacés par des IA, car l’ensemble des tâches qui leur incombent peuvent être automatisées. Selon la Commission de l’IA, cela concerne 5 % des emplois en France.

La part des emplois menacés de remplacement par des nouvelles technologies est passée de 47% à 5% en 10 ans[ii]

Le graphique ci-dessous montre le degré d’exposition de certains métiers à l’IA et la part des tâches susceptibles d’être automatisées. De nombreux métiers, comme ceux de juriste ou de médecin, ont des tâches qui ne peuvent pas être remplacées par l’IA, tandis que d’autres, comme les télévendeurs et les comptables, risquent d’être totalement automatisés. Les métiers touchés par l’automatisation par les nouvelles technologies sont très divers. L’IA va surtout impacter les métiers qui exigent une prestation intellectuelle ou des analyses de données. Les métiers remplaçables sont souvent des métiers qui demandent de faire beaucoup de saisies de données avec une répétition des tâches.

Source : Commission de l’IA, rapport de mars 2024

L’IA va également créer des emplois en stimulant la croissance dans certains secteurs et en faisant émerger de nouveaux métiers. Selon la Commission de l’IA, les entreprises qui adoptent l’IA en France constatent en moyenne une augmentation de l’embauche grâce aux gains de performances permis par cette technologie.

Le Forum économique mondial, dans son étude Future of Jobs Survey de 2023, estime une perte totale de 83 millions d’emplois dans le monde et la création de 69 millions entre 2023 et 2027[iii]. Certains secteurs sont en nette baisse à cause de l’environnement économique, politique et technique. Les secteurs qui offrent un gain net d’emploi sont liés au numérique, avec au premier rang les métiers impactés par l’IA. Les études tendent à montrer que tandis qu’elle remplacera certains métiers, l’IA sera un facteur de transformation et de création d’emplois.

La transformation des métiers par l’IA

L’IA ne se limite pas à l’automatisation des tâches, elle transforme aussi les métiers utilisant des outils numériques.

L’IA est un outil pour initier des processus d’innovation. Elle peut aider de nombreux professionnels à trouver de nouvelles idées ou à résoudre des problèmes. Cependant, elle a aussi des limites et semble ne pas être adaptée pour finaliser un processus d’innovation. En raison de sa nature, l’IA ne peut pas inventer de nouvelles choses, elle ne peut que produire à partir de ce qu’elle connaît. Elle peut combiner des éléments, mais ne peut rien créer de totalement nouveau. Les bénéfices de l’IA permettent tout de même une augmentation importante de la productivité dans les pays développés, jusqu’à 20% en France d’ici 2035.

Source : Artificial Intelligence: in-depth market analysis

L’IA permet de réduire le temps consacré à des tâches chronophages, peu intéressantes et parfois complexes. Par exemple, l’écriture d’e-mails, la recherche d’informations ou la création de documents, qui peuvent prendre 30 à 40 % du temps de travail hebdomadaire dans certains métiers comme les métiers du droit, du conseil ou les métiers administratifs[iv]. Autre effet possible de l’IA, c’est le sentiment de l’employé vis-à-vis de son travail. Une étude[v] révèle que dans les métiers comme celui de consultant ou de manager, l’IA augmente le sentiment positif sur leur travail. Ce qui a pour conséquence de réduire le turnover.

Au contraire, un mauvais usage de l’IA peut augmenter le stress et réduire la qualité de vie au travail. Sans oublier les risques portés au système d’information de l’organisation. Cela souligne l’importance d’une bonne gestion des outils et d’un dialogue ouvert entre employés et managers à leur propos, comme le recommande la Commission pour l’IA.

La mention « IA » commence à apparaitre dans les intitulés de poste des personnes ayant reçu une formation permettant l’accompagnement à l’intégration de l’IA dans les organisations. Le salaire moyen des profils maîtrisant l’IA sera vraisemblablement plus élevé que celui de leurs homologues n’ayant pas franchi cette étape, en raison de leur rareté. Dans certains métiers, la concurrence sera de plus en plus rude pour ceux qui ne développeront pas cette compétence.

Conclusion

On ne connaît pas encore précisément l’impact de l’IA en France, mais les données montrent que la transformation des métiers et le marché de l’emploi peuvent être positivement impactés par l’IA. À condition que le sujet soit maîtrisé par les pouvoirs publics, les organisations et les personnes.

Bien maîtrisée, l’IA peut améliorer la satisfaction professionnelle, car elle permet de produire plus rapidement et de meilleure qualité tout en réduisant les écarts de performance entre les employés juniors et seniors. Il est donc important pour ceux dont les métiers seront touchés par l’IA qu’ils en apprennent davantage sur cette technologie, qu’ils se forment et commencent à l’utiliser. Une meilleure compréhension permettra aussi de mieux encadrer l’utilisation de l’IA et de favoriser un vrai dialogue au sein des organisations sur son utilisation et son intégration.

Par Florent Ammour